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Défendons l’instruction à domicile
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Défendons l’instruction à domicile

Bonjour à tous ! Chaque lundi nous vous envoyons un “Édito” au format écrit 📝👇 ET audio 🎧☝️, pour à la fois mettre la semaine à venir en perspective et rappeler les contenus mis en ligne la semaine précédente.

L’“Édito” de cette semaine parle (à nouveau) d’éducation et est écrit en réaction à l’annonce faite par Macron de sa volonté de faire interdire l’instruction à domicile.

Il y a quelques jours, parmi une série de mesures destinées à combattre le “séparatisme” islamiste, Macron a annoncé qu’il était question que “l’instruction à domicile” soit désormais interdite, sauf pour raison médicale. Rapidement, des milliers de familles, mais aussi éducateurs et startups, qui innovent en matière d’éducation pour offrir plus d’autonomie et de personnalisation aux élèves se sont insurgés contre cette mesure liberticide. 

L’instruction à domicile représente une sorte de laboratoire d’innovation pour repenser l’éducation à l’âge entrepreneurial. Les milliers d’enfants et adolescents qui en font l’expérience viennent souvent de milieux plutôt plus favorisés et éduqués que la moyenne. Les outils, méthodes et principes ainsi imaginés par un petit nombre d’individus positionnés à la frontière de l’innovation pourraient servir demain la masse d’élèves moins privilégiés.

La fin de l’instruction à domicile est d’autant plus malvenue que la période de pandémie révèle les difficultés de l’Éducation nationale en matière de transition numérique. Alors que de nombreuses classes doivent fermer à nouveau à cause d’un virus dont on ne verra pas la fin de sitôt, même en faisant la politique de l’autruche, on annonce qu’il n’y aura plus moyen d’échapper à l’obligation d’aller en classe (sans masque pour les moins de 11 ans), et qu’il n’y a donc pas d’innovation à l’horizon.

L’école perd en attractivité

Plus l’école perd en attractivité et plus il existe des alternatives, plus il devient nécessaire d’en rendre la fréquentation obligatoire. (Si les cinémas pouvaient en faire autant, ils ne manqueraient pas de le faire.)  C’est un peu comme ces entreprises en déclin qui se mettent à interdire le travail à distance pour “renforcer l’esprit d’équipe”. C’est ce qu’avait fait Marissa Mayer, la CEO de Yahoo, en 2013. Mais cela n’a pas sauvé Yahoo. Si les gens ne travaillaient plus bien, ce n’était pas à cause du télétravail mais parce qu’ils étaient à bord d’un navire en train de faire naufrage.

L’école française n’est pas à la hauteur de la transition numérique. Les outils numériques qu’on utilise sont d’un autre âge. On n’équipe pas les enseignants, qui doivent tout financer de leur poche. L’école n’a pas quitté le paradigme de l’économie de masse. Elle continue de se focaliser sur l’idée de délivrer le même service standardisé à tous, mais en plus elle le fait de moins en moins bien.

Quelle égalité devant le service public ?

Le service standardisé d’autrefois a permis une démocratisation de l’enseignement et l’ascension sociale d’un grand nombre de Français. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Depuis vingt ans, l’enquête PISA de l’OCDE révèle des résultats de plus en plus mauvais pour la France, et en particulier, des inégalités tristement élevées. “Les élèves français de milieux sociaux économique défavorisés sont cinq fois plus nombreux que ceux des milieux favorisés à ne pas atteindre le niveau minimal de lecture. C’est l’un des scores les plus élevés de l’OCDE”, explique le secrétaire général de l’OCDE

L’égalité devant le service public n’est plus qu’un mensonge. En réalité, l’école d’aujourd’hui rend de moins en moins bien un service conçu pour le monde du XXe siècle. Face à cela, les parents doivent ruser avec la carte scolaire pour échapper comme ils peuvent aux ghettos où se concentrent la pauvreté et l’isolement social. Si radicalisation religieuse il y a, c’est dans ces ghettos qu’elle se forge.

Il faudrait changer de paradigme

Prétendre vouloir faire passer tout le monde sous la même toise au nom de l’intégration et de la lutte contre les “séparatismes” est donc bien hypocrite. Mais c’est aussi empêcher un changement de paradigme aujourd’hui nécessaire – d’une économie de masse à une économie numérique, plus artisanale, pour laquelle l’instruction à domicile peut devenir un laboratoire, indispensable à la découverte de nouveaux modèles et de nouvelles approches. Comme je l’ai écrit dans un Édito précédent :

Le modèle de services égaux, standardisés et centralisés est incompatible avec notre âge numérique, qui requiert “itérations”, expérimentations et innovations sur le terrain. Ce n’est pas de “soldats” interchangeables dont l’Education nationale a besoin, c’est de relations humaines singulières. Comme l’explique Hilary Cottam dans un livre superbe intitulé Radical Help, “les relations humaines sont la ressource la plus précieuse dont nous disposons”.

À propos de son livre, j’ai écrit : “L’offre de services de proximité telle qu’elle est structurée aujourd’hui minimise l’importance des relations singulières entre individus. Le modèle fordiste et sa recherche des gains de productivité par l’organisation scientifique du travail ont façonné la manière dont on a structuré toutes les activités au XXe siècle, dans le secteur public comme dans le secteur privé.”

Il faut dire que les parents (et souvent les enfants) éprouvent parfois le besoin d’échapper à l’école. Le mal-être à l’école est un mal en croissance, du côté des élèves (à cause du harcèlement, par exemple) comme des professeurs, qui se voient accorder de moins en moins d’autonomie dans l’exercice de leur métier. Cherche-t-on aussi à empêcher les “séparatismes” enseignants ?

Faute d’innovation, un déclin inéluctable

Le résultat, c’est que l’école est également de moins en moins attirante pour les enseignants : année après année, on a de plus en plus de mal à les recruter et on doit recruter des enseignants à 4/20 de moyenne au CAPES en mathématiques, mais aussi recruter plus de vacataires. “Cela commence à ressembler à une hémorragie. Année après année, le nombre d’inscrits aux concours enseignants tend à se réduire. Et les chiffres de la session 2020 sont particulièrement préoccupants” (La Croix, “Concours enseignants, où sont passés les candidats ?”).

Enfin, les enfants auraient besoin d’apprendre sur les autres cultures plutôt que de se voir forcés de passer sous une toise unique. Mais l’école française n’aime pas les différences culturelles. Par exemple, l’enseignement des langues étrangères y est particulièrement indigent. 

C’est pour toutes ces raisons que les freins qui sont mis aujourd’hui au développement de systèmes alternatifs et à l’innovation en matière d’éducation sont affligeants.


L’éducation est un sujet qui nous passionne à Nouveau Départ. Allez découvrir quelques-uns des autres contenus que nous avons réalisés sur ces sujets :

👉 Les incohérences de la rentrée scolaireaccessible à tous.

👉 La désagrégation du système scolaireréservé aux abonnés.

👉 Éducation à domicile : une nouvelle frontière ?réservé aux abonnés.

👉 Apprendre sans aller à l'école (conversation avec Elsa Cohen)accessible à tous.

❓ Nous vous l’annoncions ces derniers jours : nous avons collecté une première série de questions auprès de nos abonnés pour une émission pilote #AskUsAnything.

Pendant une heure, Nicolas et moi répondons aux questions soumises par les uns et les autres, sur des sujets qui vont de l’entrepreneuriat à la crise sanitaire en passant par la solitude, la presse généraliste, la façon dont nous travaillons pour produire Nouveau Départ et bien d’autres choses encore.

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