Notre second podcast “À deux voix” 🎧 de la semaine est consacré au sujet des normes vestimentaires et de l’émancipation des individus dans la société française.
En parlant de « tenues républicaines » à l’école, le ministre de l’Éducation nationale a suscité l’ire des féministes, pour qui les jugements et restrictions concernant les normes vestimentaires — qu’il s’agisse du voile ou des crop tops— visent toujours spécifiquement les femmes 👚 et touchent profondément à leur émancipation.
Il y a quelques jours, Jean-Michel Blanquer a créé la polémique en parlant des vêtements dans les établissements scolaires et des règlements les concernant : « L'école n'est pas un lieu comme les autres, ce n'est pas comme si vous allez à la plage ou en boîte de nuit. Chacun peut comprendre qu’on vient habillé d’une façon républicaine » a-t-il expliqué à la radio. Mais que signifie « d’une façon républicaine » ? L’expression n’a pas manqué de faire réagir Rebecca Amsellem qui a écrit dans sa newsletter Les Glorieuses :
Nous pouvons maintenant répondre à la fameuse question « un t-shirt Batman c’est républicain ou pas ? » Oui, un t-shirt Batman peut-être considéré comme « une tenue républicaine » dès lors qu’il est porté par un garçon. Mais s’il est porté par une fille, cela dépend. S’il est trop court, c’est non. S’il est trop long, c’est non. S’il est trop transparent, c’est également non. Et si le design du t-shirt fait que ce dernier lui couvre les cheveux, c’est complètement non, « parce qu’on est en France MADAME ». En somme, tout ce qui est porté par un garçon et qui ne peut pas être qualifié de « féminin » est considéré dans notre société comme une tenue républicaine. Tout ce qui est porté par une fille, eh bien cela dépend de la réaction des hommes qui la verront.
🎧 À ce sujet, réécoutez ma conversation avec Rebecca il y a quelques semaines 👉 Féminisme : la nouvelle génération ✊
Tout cela a créé la polémique au sein même du gouvernement. Élisabeth Moreno, la ministre déléguée à l'égalité femmes-hommes, s’est empressée de dire au Parisien que : « En France, chacun est libre de s'habiller comme il le veut. Les femmes ont mis des siècles à pouvoir s'affranchir de codes vestimentaires. Cette liberté conquise de haute lutte n'a pas de prix. C'est aussi un enjeu d'éducation des jeunes garçons, du rapport qu'ils entretiennent aux jeunes filles et lié aux valeurs de respect. »
Nicolas et moi réagissons à ces débats dans cet épisode “À deux voix” dans lequel nous parlons des normes vestimentaires, de nudité et de culture, et arrivons à la conclusion que le vêtement est le terrain de toutes les guerres culturelles. Pour l’occasion, nous avons également rédigé une “Note de lecture” sur l’ouvrage La Robe : Une histoire culturelle—Du Moyen Âge à aujourd’hui de Georges Vigarello (2017).
Et si le vêtement était bien moins superficiel qu’il n’y paraît ? C’est parce que le vêtement est si parlant sur la culture, et notamment, sur les rôles assignés aux femmes et aux hommes dans une société, qu’historiens et sociologues s’y intéressent autant. Corsets, chaussures inconfortables, jupes ou robes ont souvent empêché les femmes d’êtres libres de leurs mouvements. Les corsets dans l’Europe du XIXe siècle ou la coutume des pieds bandés en Chine offraient même la garantie qu’elles n’iraient nulle part.
Quand on regarde se succéder les modes vestimentaires au fil des décennies, on voit les vêtements devenir tantôt amples et confortables, tantôt rigides et contraignants, et on ne peut s’empêcher de constater en parallèle que les vêtements plus souples accompagnent souvent une certaine libéralisation des moeurs. Les vêtements des femmes ouvrières pendant la seconde guerre mondiale ne ressemblent en rien à ceux qu’elles ont porté en bonnes ménagères des années 1950, par exemple.
Pourtant, associer systématiquement l’amplitude d’un vêtement avec le pouvoir du corps qui le porte serait trop simpliste. L’histoire montre que les vêtements les plus contraignants ont parfois été détournés comme symboles de pouvoir. Le talon aiguille en est un exemple emblématique, comme le corset, que l’on retrouve dans l’univers des sado-masochistes.
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(Générique : Franz Liszt, Mephisto-Valse, S.514—extrait du disque Miroirs de Jonas Vitaud, NoMadMusic.)
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